Jeux vidéos engagés

Le temps de l’engagement

Présentation du mini-dossier « Jeux vidéos engagés », dossier initialement publié dans le numéro 67 de la revue À bâbord !

Depuis quelques années, l’univers du jeu vidéo se transforme rapidement. Cette industrie est devenue au moins aussi importante que l'industrie du cinéma. Elle a rapporté aux États-Unis l'an dernier près de 23,5 milliards $US, le titre le plus populaire ayant rapporté à lui seul plus de 2 milliards $US – pratiquement autant que la production hollywoodienne Avatar. Les joueurs changent aussi : ils jouent de plus en plus sur des plateformes mobiles et la part des joueuses dépasserait maintenant de peu celle des joueurs selon des études. Au Canada, où cette industrie est importante, les développeuses de jeux vidéo ne représentent cependant que 16 % des travailleurs de l’industrie.

Le jeu vidéo a fait son entrée dans les musées comme le Museum of Modern Art de New York ou le Centre national d’art et de culture George-Pompidou, à Paris. Le monde universitaire l’étudie sous toutes ses facettes, comme nouveau média interdisciplinaire dans les facultés d’art et de littérature autant que d’informatique, ou encore comme phénomène social en sociologie ou en communications. Une scène active du jeu indépendant s’est aujourd’hui développée et explore les possibilités du jeu avec plus de créativité que l’industrie. Certain·e·s décident d’ailleurs de rendre les jeux qu’ils et elles produisent accessibles et modifiables par tous et toutes, créant ainsi des communautés de joueurs-développeurs. En outre, plusieurs ONG commandent la production de jeux pour sensibiliser le public à des enjeux qui les préoccupent. Des jeux sont ainsi produits pour apprendre, entraîner, sensibiliser ; on conçoit des documentaires interactifs sous forme de jeux.

Comme d’autres nouveaux médias ayant suscité à leurs débuts un certain scepticisme (le cinéma, la bande dessinée), le jeu vidéo est aujourd’hui reconnu comme un moyen d’expression d’idées sociales ou politiques à part entière. Voyons pourquoi.

Articles du mini-dossier

Points de vue syndicaux sur l’état de l’école primaire

Entrevue initialement publiée dans le dossier Ouvrir l'école du numéro 76 de la revue À bâbord !

Les enseignantes et les enseignants sont les principaux agents qui mettent en œuvre la mission de l’école primaire. Leurs syndicats ont donc un point de vue privilégié sur les enjeux de l'école primaire. Brigitte Bilodeau et Jacques Tondreau, respectivement vice-présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE-CSQ) et directeur du Service de l'action professionnelle et sociale de la CSQ, ainsi que Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l'enseignement (FAE), répondent à nos questions.

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Mépriser le savoir par mesure d’économie

Lettre que j'ai co-signée avec trois collègues du Cégep de Saint-Laurent et qui a été envoyée au Ministre avec des centaines de signatures récoltées en quelques jours.

Voir la liste complètes des signatures -- ou ajouter la vôtre !

Monsieur Duchesne,
Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie,

Quand votre collègue Stéphane Bédard, président du Conseil du trésor, envisage de réévaluer à la baisse la tâche des professeurs de cégep, et ce, en deçà de celle des professeurs du primaire et du secondaire, qu’il projette également de nous refuser la reconnaissance de la maîtrise et du doctorat, dénotant ainsi une méconnaissance étonnante, et inquiétante, de l’enseignement supérieur, nous nous attendons à ce que vous montiez au créneau pour défendre cet enseignement dont vous avez la responsabilité.

Certes, nous n’avons pas charge d’âmes de mineurs (encore que... les étudiants de première session ont souvent 17 ans), mais nous avons l’immense responsabilité de préparer de jeunes hommes et femmes aux études universitaires et, dans le cas des programmes techniques, à l’entrée dans la vie professionnelle, mais également à la vie citoyenne. Notre travail consiste à transmettre un héritage culturel, scientifique, intellectuel, critique et technique dont le niveau et la complexité supposent l'appropriation, de notre part, d'un bagage disciplinaire solide sur lequel s'arriment nos compétences pédagogiques. Par conséquent, la préparation de cours du niveau collégial se distingue assez fondamentalement de celle des cours du primaire ou du secondaire, fortement balisés par des devis et des manuels. Nous bâtissons nos cours au fil des ans; chacun d'eux est fondé sur des heures, des semaines, des mois et des années de recherche, ce à quoi nous servent directement nos habiletés de chercheurs développées au cours de nos études de deuxième et troisième cycles ou par un long travail d'approfondissement et d'adaptation des connaissances disciplinaires spécialisées déjà exigées pour l'entrée dans notre profession. Ce n’est pas pour rien que 40 % des professeurs de cégep sont munis d’un diplôme de maîtrise ou de doctorat. Or, si l’on en croit les intentions de votre collègue du Conseil du Trésor, non seulement nous mériterions une baisse de salaire, mais nous ne serions plus à même de faire reconnaître ces diplômes.

Par ailleurs, la collégialité au cœur du fonctionnement en départements, un principe fondamental de l'éducation supérieure que semble méconnaître le Conseil du trésor, nous pousse tous à participer à un processus de réflexion autour de nos connaissances disciplinaires. Nous participons à de multiples comités, élaborons des plans-cadres à partir des devis de votre ministère (pensez donc au travail de réflexion que va représenter la refonte des cours dans le cadre du nouveau programme Arts, lettres et communication...), consacrons de nombreuses heures hors des cours à rencontrer nos étudiants, mettons sur pied des Centres d’aide pour les élèves en déficit de connaissances en français, en philosophie, en mathématiques, etc. Et nous trouvons encore le moyen de participer activement à la recherche et à la diffusion du savoir dans nos domaines respectifs, en rédigeant des articles, en participant à des colloques, à des groupes de recherche et à des projets créatifs et techniques, en collaboration avec nos collègues universitaires, qui reconnaissent, eux, nos compétences de chercheurs. Cette activité qui nous stimule enrichit nos cours. Les premiers bénéficiaires en sont nos étudiants.

Vous pourriez signaler à votre collègue qu’on ne parviendra jamais à convaincre les étudiants de persévérer dans leurs études si le savoir, au Québec, appauvrit. On ne cesse de nous marteler que les étudiants devraient payer leurs études universitaires parce que, plus tard, ils en tireront un meilleur salaire. Or, non seulement ce raisonnement est-il fallacieux, mais ce réajustement à la baisse de l’échelle salariale des professeurs de cégep et le retrait de la possibilité de faire valoir nos diplômes prouvent exactement le contraire. Non seulement nous ne devrions pas voir notre tâche réévaluée à la baisse, mais nous devrions la voir mieux évaluée qu’elle ne l’est aujourd’hui.

D’une main, on nous prêche « l’économie du savoir » et de l’autre, on méprise ce savoir par mesure d’économie. Faudrait savoir...

Nous avons la conviction que ces enjeux, qui concernent directement votre mandat et l’avenir de l’éducation au Québec, ne peuvent vous laisser indifférent et nous nous attendons à vous entendre.

Brigitte Faivre-Duboz, professeure de littérature, cégep de Saint-Laurent

Co-signataires
Frédérique Bernier, professeure de littérature, cégep de Saint-Laurent
Yannick Delbecque, professeur de mathématiques, cégep de Saint-Laurent
Anne-Marie Voisard, professeure de psychologie, cégep de Saint-Laurent